Miracle à la Cour

Par Olivier Grassini

 

 

Je suis la princesse Gabrielle et c’est mon histoire que je vais vous conter.
Et peut-être un peu plus. . .

      Il était une fois, dans un royaume où le merveilleux pouvait se montrer aux gens audacieux, un roi, une reine et leur fille unique. Le royaume était tranquille et en paix avec ses voisins. Le roi Casimir avait épousé la princesse Solenne il y avait de cela maintenant une quinzaine d’années et de leur union devait naître une année plus tard la princesse Gabrielle.

      C’est donc dans cet environnement que j’ai grandi. Je me souviens des murs froids du château, des tourelles biscornues, parfois des escaliers qui ne menaient nulle part et on m’avait interdit d’aller jouer au grenier. Selon les légendes on y avait entreposé un rouet maudit qui n’aurait pas porté chance à une lointaine cousine.

      Je n’ai rien de spécial à dire sur mes parents. Ils étaient d’humeur égale, mon père se contentait de gérer son royaume de manière débonnaire comme l’avait fait son père avant lui. Il était assez distant avec un peu tout le monde et n’avait qu’une réelle passion : la pêche à la truite qu’il n’entendait vivre que de manière solitaire, ce qui posait réellement des problèmes au chef des gardes qui devait à chaque fois déployer des trésors d’ingéniosité pour pouvoir le surveiller à distance sans que ce dernier ne s’aperçoive de rien. Ma mère était très bonne avec moi, m’apprenant tout ce qu’elle savait et ce que je devais faire pour devenir une vraie princesse digne de ce nom. Je dois bien avouer que je l’ai assez tôt prise de haut et que j’étais vite devenue assez capricieuse et autoritaire.

      J’aurais voulu que ma vie ressemble à celle des contes que l’on m’avait narré lorsque j’étais toute petite. Une vie pleine d’aventure, de chevaliers et de dragons maléfiques. Mais hélas il faut bien avouer que rien ne se passait jamais dans ce royaume où j’ai grandi, dans la plus grande des monotonies.

      Et la monotonie est devenue langueur et mes rêves se sont peu à peu envolés pour ne laisser que grisaille dans mon quotidien.

      Les nombreux médecins et praticiens qui m’ont examinée alors ont conclu à une maladie de langueur. Une affection très rare mais aussi très dangereuse et qui pouvait amener à la mort du sujet atteint. Il n’existait pas de remède connu et les efforts déployés pour essayer de me distraire ou me faire penser à autre chose furent vains. On pensa à une malédiction mais les enchanteurs et alchimistes convoqués au palais ne trouvèrent pas de source identifiable à cette maladie. Ma santé faiblissait et alors que j’atteignais ma dix-septième année, je n’étais pas sûre de pouvoir atteindre mes dix-huit ans.

      La santé de ma mère commença alors à décliner comme elle était accablée de chagrin. Mon père fit alors quérir son grand Veneur. Il lui expliqua qu’il savait que dans ce monde rien n’était impossible et lui ordonna de trouver une solution pour me guérir. Il ne voulait pas perdre à la fois sa femme et sa fille.

      Le grand Veneur écouta attentivement le roi et partit, en quête d’une solution.

      Il revint, quelques mois plus tard un peu avant l’aube, en compagnie d’un étranger emmitouflé dans une ample cape et dont personne ne put voir le visage. Il expliqua alors au roi que cet étranger avait possiblement le moyen de me guérir mais il devait rester seul avec moi et par la suite, il ne faudrait pas que je puisse une fois guérie entrer en contact avec quoi que ce soit qui puisse me rappeler le
temps pendant lequel j’avais été malade car je rechuterais alors immédiatement. Mon père attendit de voir. Deux journées s’écoulèrent.

      Et la princesse Gabrielle refit son apparition à la cour.

      Au départ hésitante et encore un peu faible, elle semblait peu à peu reprendre de l’assurance. Le roi tint sa promesse et fit murer en l’état mon ancienne chambre avec tout ce qu’elle contenait. Le grand Veneur fut couvert d’or et le royaume était en liesse.
Et puis la princesse n’était plus capricieuse ni hautaine. L’épreuve qu’elle avait enduré l’avait rapproché des petites gens qu’elle traitait avec considération, un vrai miracle !

      Comment était-ce possible ? Les meilleurs soigneurs s’étaient succédé à mon chevet et m’avaient tous dit qu’il n’existait pas de remède possible.

      Et cet étranger n’a pas cherché à me soigner.

      Il avait des traits graciles et fins. Un peu comme ceux que l’on pourrait attribuer à ces elfes de légende. Sa peau était diaphane et ses cheveux blancs. Je ne saurais dire si c’était d’ailleurs un garçon ou une fille, il paraissait très jeune. Pendant ces deux journées que nous avons passé ensemble il s’est mis peu à peu à me ressembler pour finalement devenir comme une sœur jumelle.

      La princesse Gabrielle est revenue dans son royaume et elle est resplendissante et plus gentille que je ne l’aurais jamais été.

      Pour ma part j’ai fini par me détacher de mon corps et je peux donc l’admirer et me réjouir de tout ce bien qu’elle peut faire autour d’elle.

Et parfois, dans ses rêves, je lui murmure quelques conseils.
Elle comme moi nous aimons les histoires qui se terminent bien…

 

 

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